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Pétain au Ban de Champagney

Le 21 août 1944

 

Cette histoire fut recueillie en 2000 auprès de Paulette Ruga. Son époux Georges Jacquot, figure bien connue bien des Ronchampois, fut instituteur à l’école polonaise.

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         Ce matin là, Paulette, en compagnie de son oncle Armand Ribaud, est en route pour le Ban de Champagney. Georges est à l’époque prisonnier de guerre en Allemagne. Ils utilisent le seul moyen de locomotion du moment : la bicyclette. L’objectif est de récupérer des pommes de terre chez l’oncle Armand dont la maison se trouve un peu après le chemin qui conduit au bassin de Champagney.

         Depuis Ronchamp, où habite Paulette, le chemin est facile mais l’ascension du Pied-des-Côtes sépare les deux cyclistes. En effet l’oncle abandonne la jeune femme qui ne peut franchir la dure montée qu’à pied. Elle perd Armand de vue et se retrouve seule. Arrivée au-dessus du Pied-des-Côtes, juste après la dernière maison de ce hameau, un grand vacarme la surprend. Elle a juste le temps de se retirer sur le bas côté qu’elle voit surgir devant elle des motards suivis d’un long cortège de voitures qui la dépasse à grande vitesse.

         Tout à coup, Paulette voit arriver une lourde limousine noire. Elle est ornée d’un fanion tricolore et ferme le cortège. A travers la vitre arrière, elle aperçoit une personne aux cheveux blancs, encadrée d’officiers français.

 

         Encore toute bouleversée par cet événement aussi inattendu que bruyant et rapide, Paulette poursuit son chemin sur une cinquantaine de mètres. Toujours à pied, son vélo à la main, elle aperçoit soudain un papier par terre. Plié, sans enveloppe, il est au bord de la route près du talus. Paulette le ramasse sans réfléchir et, tremblante, regarde autour d’elle comme si elle était en faute. Elle est seule, l’oncle bien loin. Elle fourre vivement le papier au fond de sa poche.

         Arrivé à la maison de l’oncle, elle l’interroge. Il n’avait pas vu le papier. Ils le découvrent alors au calme, le lisent ensemble et en déduisent que le convoi était bien celui qui conduisait le maréchal Pétain à Belfort.

         Tout ceci se passait le matin du 21 août 1944, entre 10 et 11 heures.

 

         L’histoire nous dit qu’il s’agissait bien de Pétain. Ayant quitté Vichy la veille et passé la nuit à Saulieu, il arrive à Belfort ce 21 août avant d’être transféré le 24 août au château de Morvillars où il séjournera jusqu’au 7 septembre date de son étape définitive pour Sigmaringen.

 

         Et le papier ramassé par notre témoin ? En réalité deux papiers pliés en huit, du papier léger et fragile utilisé pour faire des copies à l’aide de carbones. Il s’agit d’un long texte daté du 20 août 1944 à Vichy, dans lequel Pétain explique au peuple français sa situation qui, affirme-t-il, est celle d’un prisonnier. On imagine que d’autres copies de ce texte ont été répandues au cours du voyage du Maréchal entre Vichy et Belfort, car on sait que certains exemplaires de cette déclaration existent (Il y en a un exemplaire au musée de la Résistance et de la Déportation à Besançon).

 

         C’est avec beaucoup d’émotion que Paulette montrait, 56 ans après les avoir récupérés au bord de la route nationale, ces feuillets jaunis et porteurs d’histoire.

 

         Paulette Ruga était la fille de Léon Ruga – grande figure de l’harmonie municipale de Champagney.

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Dessin de Jean Effel. Pétain et Laval sont restés à Belfort puis à Morvillars du 21 août au 7 septembre 1944. En réalité, ils ne se rencontreront qu’une seule fois à Morvillars.

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Les deux feuillets ramassés par Paulette Ruga au bord de la RN 19

 

 

 

 

 

Tag(s) : #Histoire locale
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